La Revue du Cinema (1947)

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cheveux devant le miroir accroché au tronc d'arbre, le tronc avait l'air d'un corps d'homme revêtu d'un habit de marié, mais cet homme n'avait pas de visage, le miroir ne reflétant que celui de la jeune fille, mais on ne le voyait pas distinctement... cet étrange marié enlaçait la jeune fille avec ses branches et valsait avec elle sur la pelouse; dans le fossé, Robert ramassait le bouquet; les oiseaux passaient continuellement dans le ciel, des tas de petits animaux couraient au ras du sol, les fleurs s'ouvraient brusquement, la main de la mariée séparait les danseurs, la jeune fille poussait un cri déchirant, la mariée regardait le marié... ciel! il a maintenant le \'isage de Robert dans ce terrible miroir, elle se retourne : Robert est devant elle et lui offre le bouquet ! Confusion, confusion... le danseur a déchaîné un petit monde meurtrier qu'il ne peut plus retenir. Tout vacille. Il tombe, roule jusqu'au bord du fleuve. II y a entre l'étendue de l'eau et l'étendue terrestre une zone intermédiaire que l'on confond souvent avec le rivage. L'on devrait bien sentir pourtant, à l'air que l'on y respire, qu'il s'agit d'autre chose. C'est une zone de promesses. A nouveau, le danseur étend les bras. Les sortilèges, presque à regret, prennent des formes de plâtre, de briques, de tuiles. Ce château, on finira peut-être par le construire. Il y a dans l'air des charpentes invisibles qui doublent les échafaudages. Le printemps éclate, sa jeune respiration, un peu partout, fait craquer l'écorce. Dans la chambre de la mariée, l'oiseau poignardé s'envole et le cœur du mannequin se met à battre. Au bord du fleuve, il y avait une sorte de petit port avec des marches circulaires qui descendaient dans l'eau. Cette eau qui ne reflétait même plus les saisons, la voilà troublée maintenant par le reflet du danseur, troublée par cette petite troupe joveuse qui gagne du terrain sur les maléfices et tente sa chance sans regarder derrière elle. Derrière elle, Julien ouvre une main. Il en échappe un médaillon où sont reproduits les traits ravissants de Robert. A l'eau tous ces souvenirs ! A l'eau aussi le poignard tombé de sa victime, emporté par le courant. Que d'oiseaux, que d'oiseaux maintenant dans le ciel! Et la jolie valse que nous allions danser au bord de l'eau, en ce jour calme et léger. Nous ne savions pas que la trahison pouvait détruire ce que le rythme avait édifié. Nous étions là, les yeux levés vers celui qui nous avait rendu le mouvement et ne songeant qu'à organiser cet univers nouveau, et derrière nous — là où nous ne regardions plus — ■ le marié et Julien, les mains tendues devant eux comme des aveugles, marchaient l'un vers l'autre, à la rencontre de la tragédie pour échapper au vaudeville. Ils se sont rencontrés sans que nous l'ayons su et le visage de Julien se refléta dans le miroir du marié et dès lors, ils n'eurent plus qu'un seul et même visage : celui des amants trahis. 44